Un rapport relance la polémique sur la dépénalisation et les salles de shoot

PARIS — La fin de non-recevoir opposée par un récent rapport parlementaire à la dépénalisation du cannabis et aux salles d'injection supervisées scandalise les partisans d'un débat sur ces sujets controversés, qui y voient un document "à charge", dans la ligne du gouvernement.

Selon ce pré-rapport parlementaire d'information sur les toxicomanies, à paraître mercredi, et dont l'AFP a obtenu des extraits, la dépénalisation de l'usage du cannabis constitue "une impasse éthique et juridique" et les salles de consommation de drogue une "option hasardeuse".

Ces conclusions, tirées au terme de dizaines d'auditions menées depuis janvier, rejoignent les positions officielles du gouvernement.

Concernant le cannabis, "il faut lutter contre la drogue et ce n'est pas en facilitant l'accès que l'on réduira la consommation", avait résumé mardi dernier le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant.

Une réponse sans appel au débat récemment relancé par un groupe de travail de députés de gauche, présidé par l'ancien ministre de l'Intérieur, Daniel Vaillant, qui a préconisé mi-juin une "légalisation contrôlée du cannabis".

"Ce pré-rapport nous choque et nous déçoit", a réagi Jean-Pierre Couteron, président de la Fédération Addiction qui rassemble des professionnels de la santé, de l'éducation et de la prévention.

"On pouvait espérer non pas une réponse positive sur la dépénalisation", à laquelle près de six Français sur dix (58%) restent opposés selon un récent sondage, "mais une réflexion sur la façon de faire évoluer l'interdit pénal, qui n'a pas rempli son rôle", souligne-t-il, en assurant que "les niveaux d'usage (de drogue) progressent".

Même déception chez les partisans des salles de consommation de drogues, une expérimentation rejetée par les rapporteurs de la mission parlementaire, qui proposent plutôt de "recourir davantage à des +maraudes+ de contact" pour "intervenir auprès des toxicomanes les plus vulnérables et précaires".

"C'est un document à charge qui ne se préoccupe que de défendre la position gouvernementale", déplore Pierre Chappard, porte-parole du Réseau français de réduction des risques, en dénonçant "approximations" et "mauvaise foi".

"Il existe déjà des +maraudes+ et cela n'a pas résolu les problèmes", souligne-t-il, en rappelant que ce sont d'ailleurs les équipes au contact des usagers dans la rue qui ont réclamé la création de salles d'injection.

En outre, poursuit-il, "le rapport fait le constat que tout va mal, que la toxicomanie s'installe en France. Pour autant, le seul chapitre sur la réduction des risques est celui sur les salles de consommation. Ils ne disent rien sur la réduction des risques en milieu festif, dans les banlieues, les campagnes..."

La veille, le député PS de Paris, Jean-Marie Le Guen, membre de cette mission d'information parlementaire, avait le premier critiqué ce pré-rapport rédigé "sans délibération" par "deux rapporteurs de la majorité".

Etienne Apaire, président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et toxicomanies (Mildt), n'a pas souhaité commenter le document avant sa publication officielle.

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